lundi 17 novembre 2008

Le Solukhumbu Trail étape par étape

10 au 31 Octobre 2008





Il est difficile de résumer une telle aventure. 15 jours, 12 étapes, 305km, 17 740m de dénivelé positive (et presque autant de négative). On pourrait en parler comme ça mais cela représente tellement plus que des chiffres que je vais prendre le risque que mon récit soit un peu « brut » et vous raconter l’aventure que j’ai vécu, étape par étape.


La 1ère étape part vite. La journée de bus de la veille se fait sentir dans les muscles endormis. Moins d’une heure après le départ…nous (une dizaine de coureurs) sommes perdus !! En effet, ils sembleraient que les enfants enlèvent la rubalise pour jouer avec...Un paysan nous guide en pleine pente à travers champ. Nous avons presque du mal à le suivre et …il est en TONG ! Bref, comme disait ce cher rené : « c’est le jeu !!! » et on a joué (certains plus que d’autres) car la rubalise s’est fait par moment…désirer. A la fin de cette étape, il y a déjà de la casse : un asthme mal équilibré et une déchirure musculaire non cicatrisée accompagnée d’une incapacité à s’alimenter.





Pour la 2ème étape, nous passons déjà à 3530m mais, en fait, on ne le sent pas vraiment. Cela équivaut en quelque sorte à un 2500m chez nous. Cette étape se déroule donc très bien pour tout le monde.





Je n’ai pas encore expliqué ce qui se passe une fois la ligne d’arrivée franchie. En fait, les choses se déroulent un peu toujours de la même manière. On nous offre, tout d’abord, un verre de « Tang » plus ou moins chaud (genre de jus de fruit chimique en poudre). Ensuite, en fonction de son état, de son envie, on se change à l’aide des vêtements qu’on emporte dans notre sac après s’être douché (la température des douches est très variable mais dans l’ensemble, on n’a pas eu à se plaindre) ou avoir utilisé les lingettes. Puis, on se restaure avec une soupe, du riz et des frites (beaucoup plus digeste et meilleurs que les nôtres, enfin c’est ce qu’on a trouvé !). Ce repas ainsi que celui du soir est préparé par notre équipe de cuisiniers. Nos sacs arrivent plus tard avec les porteurs. Ceux-ci partent, en général, une heure avant nous et leur heure d’arrivée est très variable en fonction des étapes. C’est pourquoi, nous prenons le nécessaire pour se changer et ne pas avoir froid en les attendant. Ils inspirent le respect, ils font exactement le même parcours que nous mais avec une charge de minimum 15kg sur le dos. Nous en croisons beaucoup sur le parcours avec des charge très variables et certains même très jeunes. C’est leur principal moyen de ravitaillement même si il existe également les yaks. Tout le staff est aux petits soins avec nous et anticipe le moindre de nos besoins. Je parle du staff mais tout le monde est adorable: nous sommes partout très bien accueillis et même encouragés, nous excitons même souvent la curiosité (J’avoue avoir eu par moment un peu honte de me faire encourager par les porteurs qui portaient 5 à 10 fois ma charge et qui, eux, travaillaient pendant que je m’amusais).



Les petits soucis médicaux ne sont toujours pas réglés et préoccupent le médecin. La journée d’acclimatation du lendemain servira d’observation. Nous partons assez tôt car l’objectif est de rester entre 4 et 6h au dessus de 3500m.



La 3ème étape fait en quelque sorte la transition : on quitte la plaine. Sur les crêtes de Konglemanda (4100m d’altitude), on est entre les 2, le contraste est flagrant: sur la gauche, en bas, la « vallée » et de l’autre côté, l’immensité des blanches montagnes qui paraissent tellement loin, alors qu’on est tout de même à plus de 4000m (et d’ailleurs ici pas un centimètre de neige !). Le dépaysement est total. C’est magique, magnifique. La nuit se fait en tente à Béni (3340m) et la danse, plus efficace que le feu, est de rigueur pour se réchauffer. Juste avant la nuit, un convoi est formé par le médecin pour faire descendre à Taksindu les 2 personnes qui l’inquiètent depuis le début car il juge dangereux qu’elles dorment à cette altitude.





La 4ème étape est agréable, sans grosse difficulté, constituée essentiellement du fameux plat népalais qui monte et descend tout le temps ! Dawa a, semble-t-il, annoncé des temps volontairement plus élevé afin de nous préserver…C’est donc surpris d’en terminer aussi tôt que chacun passe la ligne d’arrivée.




Le lendemain est une journée de repos à Taksindu (2700m). Dawa nous fait découvrir sa famille et nous raconte un peu plus son histoire. Nous sommes très bien accueilli dans chaque maison, impossible d’ailleurs de refuser le thé qu’ils nous offrent à chaque fois avec une grande gentillesse, cela leur tient à cœur. C’est le doc qui pouvait être content : la diurèse a largement été stimulée…Et même peut-être un peu plus pour moi… le lendemain je suis mise «hors jeu » par le syndrome gastro…et fais l’étape plus ou moins en mode rando (enfin tout du moins avec un plaisir disons restreint…). Le point de départ et d’arrivée (Poyan 2835m) de cette 5ème étape ont pratiquement la même altitude mais entre les deux, il y a la vallée 1000m plus bas donc en résumé : on descend …et on remonte !




La 6ème étape fut ma 2ème et dernière étape « hors-jeu ». La fièvre de la veille au soir m’a également coupé les jambes. Dommage : c’était une des épreuves les plus longues où il fallait zig-zager entre les touristes mais aussi les yaks… (Beaucoup plus durs et dangereux !).Bref cela demandait pas mal d’énergie et il m’en manquait. L’étape fut donc belle mais longue et…frustrante ! Nous arrivons à Namche (3340m) par une dernière montée de 700m de dénivelée. Grosse ville en altitude mais que je trouve sans réelle charme. Caroline qui a fait un début d’œdème pulmonaire n’est pas autorisée à passer les 3500m d’altitude, la compétition s’arrête donc là pour elle. Michel, après des débuts difficiles (habituels selon lui) s’adapte chaque jour de mieux en mieux.


Je trouve la 7ème étape très agréable : du plat népalais, descendant au début puis une remontée plutôt douce jusqu’à Marulung (4210m). Sur le chemin, il y a encore de nombreuses possibilités de se perdre mais pas pour moi, cette fois. Le lodge (c’est en quelque sorte comme les chambres d’hôtes, elles sont localisées le long des chemins de randonnées. Avec l’altitude, elles peuvent se rapprocher de l’ambiance refuge et être moins confortables.) est assez rudimentaire mais nous n’aurons pas froid. Par contre, les organismes sont un peu malmenés. Pour la 2ème fois, on lance une « alerte gastro » avec un renforcement des mesures d’hygiène (tout simplement se laver les mains régulièrement).



Lors de la 8ème étape, nous passerons pour la 1ère fois à 5 000m le Rinjo La (5340m plus précisément) et en plus, on y monte 2 fois car on enchaine ensuite avec le Gokyo Ri (5360m). Je supporte assez bien l’altitude: je marche tranquillement dans les montées en respirant calmement. Les derniers mètres de montée se font dans la neige pour le 1er et dans une sorte de pierrier bien vertical pour le second. L’arrivée se fait au sommet de ce dernier et on n’est pas mécontent d’en finir après cette montée disons, éprouvante. Après avoir admiré le magnifique panorama, on redescend tranquillement sur le village de Gokyo (4790m) par des lacets sablonneux. Le village est au bord d’un magnifique lac d’un bleu d’une grande pureté.






Le lendemain, pour la 9ème étape, nous faisons un aller-retour jusqu’à un lac situé un peu plus haut (environ 7km) avec 10 minutes d’arrêt obligatoire entre, afin d’apprécier le paysage. J’avoue avoir forcé sur cette étape, surtout à la descente : je n’avais aucune envie d’être rattrapée et au final, je n’étais même pas talonnée. C’est ça de ne jamais se retourner…Enfin, bref, au final, une bonne dyspnée et une quinte de toux pour la journée et qui en soirée m’ont bien fait psychoter... En effet, au diner, pour la 2ème fois de la journée, le caisson hyperbare a dû être sorti mais heureusement, toujours pas pour un de nous. Cela nous a tous bien refroidi et encore plus incité à la sécurité pour l’étape du lendemain.



J’effectue tranquillement cette 10ème étape avec Céline. Le passage au col du Cho La (5330m) offre un somptueux point de vu, même si l’arrêt est bref. En effet, il ne fait pas chaud et il reste un bon bout de glacier à passer. La traversée est un peu acrobatique mais sans grande dangerosité, elle se termine part une descente dans des blocs. La remontée sur Lobouche (4910m) se fait un peu longuette mais sans difficulté (si ce n’est la rubalise qui est absente : cela vaudra un détour par le village d’en dessous pour certains…). Ce soir-là, nous n’avons ni notre caisson, ni notre médecin officiel (2 autres médecins sont présents mais en temps que coureurs). Nous prenons donc la décision de neutraliser l’étape du lendemain.


La montée au Kalapathar (5545m), point le plus haut de la course, se fait donc sans pression, par groupe de niveau. Nous avons ainsi bien pu profiter du paysage et réaliser de nombreuses photos et vidéos. Nous redescendons à Lobouche puis Dingboche(4410m) après le déjeuner. La journée a été longue et fatigante. Nous ne tardons donc pas à aller nous coucher. En pleine nuit, nous sommes réveillés par la recherche du caisson...De nouveau, un touriste est en difficulté, une vie en danger. Après s’être assuré qu’aucune aide n’était nécessaire, nous tentons de nous rendormir mais le sommeil est un peu long à revenir.


Nous apprenons au matin que l’état de santé du hongrois (le touriste) a nécessité qu’il soit caissoné toute la nuit. On ne peut s’empêcher de penser : »heureusement qu’on était là ! ». Nous attendons donc que l’hélico vienne le chercher pour lancer le départ de la course. J’avoue que ce matin, la motivation n’est pas là : ce 4ème caissonage, ça commence à faire beaucoup !!! De plus, pour la 1ère fois, ce matin, le soleil n’est pas là et le vent souffle légèrement. Nous avons donc un peu de mal à nous mettre en route. Le moral est encore un peu plus entamé car le Nupste base Camp (4745m) se fait désirer…Nous savons qu’il doit être encore bien loin car nous n’avons toujours pas croisé les premiers (La 11ème étape est constitué d’un aller-retour de Dingboche à Nupste base camp enchainé avec la descente sur Tengboche 3860m). Nous finissons donc par croiser des coureurs mais de manière assez espacée. Le moral est donc un peu amélioré même si le grésil et le froid le mettent à rude épreuve. Je ne m’attarde pas au base camp : j’ai l’onglet et le paysage n’est pas dégagé. La descente est longue mais assez agréable enfin surtout la 2ème partie de Dingboche à Tengboche car plus on descend, plus le soleil revient. Au final, nous aurons fait 28 km pour 20 annoncés.


La 12ème et dernière étape est composée de « descente népalaise » (au final, ça descend …et ça monte) puis d’un passage déjà effectué à la 6ème étape mais dans l’autre sens. Nous partons donc tôt afin d’éviter touristes et yaks et … il faut avouer que c’est assez réussi : nous n’en croiserons que très peu. Le bruit des avions annonce l’arrivée à Lukla (2800m). Cette fois, le kilométrage annoncé doit être revu à la baisse : les 40 km n’y sont pas mais il faut avouer que ça ne nous dérange pas…Nous franchissons donc la ligne d’arrivée heureux d’en terminer (même si il faut avouer que le manque ne sera pas long à se faire sentir).













On ne réalise réellement l’extraordinaire aventure qu’on a vécu qu’une fois rentrée et on a alors qu’une seule envie…y retourner, pas forcément en courant mais y retourner ça c’est sûr.

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